Agnès Giboreau est Directrice de la Recherche à l’Institut Paul Bocuse où elle anime une équipe multidisciplinaire (chercheurs, doctorants, ingénieurs, cuisiniers) dont la mission est de produire, transmettre, valoriser des connaissances et savoir-faire originaux et de contribuer à l’amélioration du bien-être des populations, quels que soient l’âge et le contexte de repas ou d’accueil, en France et à l’international (http://recherche.institutpaulbocuse.com/).
Docteur-Ingénieur en Sciences des aliments, titulaire d’un Master de Psychologie cognitive et Habilitée à Diriger des Recherches, ses recherches portent sur la perception et le comportement des consommateurs, principalement au moyen d’études in situ : en Living Lab (restaurant expérimental de l’Institut Paul Bocuse) et en situation réelle (restaurant scolaire, EHPAD, hôpital).
- Fernandez, P., Bensafi, M., Rouby C., Giboreau, A. (2013) Does olfactory specific satiety take place in a natural setting? Appetite, 60(1), 1-4.
- Giboreau A. & Dougkas A. (2018) Gastronomy as an aid to increasing people’s food intake at healthcare institutions. In: Ferranti, P., Berry, E.M., Anderson, J.R. (Eds.), Encyclopedia of Food Security and Sustainability, vol. 1, pp. 540–545. Elsevier.
- Giboreau A. (2017) Sensory and consumer research in culinary approaches to food. Current Opinion in Food Science, 15, 87-92.
- Morizet, D., Depezay, L., Masse, P., Combris, P., Giboreau, A. (2011) Perceptual and lexical knowledge of vegetables in preadolescent children,. Appetite, 57(1). 142-147.
- Navarro D.A., Boaz M., Krause I., Eli A., Chernov K., Giabra M., Frishman S., Levy M., Giboreau A., Kosak S., Mouhieddine M. & Singer P. (2016) Improved meal presentation increases food intake and decreases readmission rate in hospitalized patients. Clinical nutrition, 35, 1153-1158.
- Pouyet V., Cuvelier G., Benattar L., Giboreau A. (2015) Influence of flavour enhancement on food liking and consumption in elderly subjects with poor, moderate or high cognitive status. Food Quality and Preference. 44, 119-129.
Le 13 mai dernier, le lancement du projet CANUT a été annoncé à la Presse. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur la naissance de ce projet et son objectif ?
Ce projet fait suite à une première collaboration avec les Hospices Civils de Lyon, à l’initiative du Pr. Pierre Jean Souquet, Pneumologue Oncologue qui a soulevé la question des perturbations du goût chez ses patients sous chimiothérapie. Avec Martine Laville, HCL-Centre Européen pour la Nutrition et la Santé, et Moustafa Bensafi CNRS- Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon, et avec le soutien de la région (projet ARC1) nous avons pu mener une étude exploratoire et recueillir des premiers résultats que nous allons maintenant poursuivre. Notre hypothèse est que les récepteurs du goût et de l’odorat, centraux dans la dégustation, sont altérés chez les patients atteints de cancer et sous chimiothérapie, modifiant la perception et l’appréciation des aliments.
Le principe de ce projet est d’étudier les modifications des mécanismes de perception des aliments, avec l’hypothèse que plusieurs types de profils sensoriels existe chez les patients. L’identification des différentes typologies permettra de proposer des aliments spécialement formulés pour compenser les perturbations du goût : diminuer ou augmenter l’intensité des arômes, des saveurs, enrichir la texture… A l’issue des phases expérimentales, un guide spécifique sera conçu, et testé auprès de patients. Le guide CANUT comprendra des recommandations en termes de préparation culinaires, tout en intégrant les recommandations essentielles en termes diététiques. Des exemples de recettes seront également proposés.
Au-delà de ce projet CANUT, avez-vous d’autres perspectives de projets en cancérologie ?
Tout à fait. En effet, compte tenu des multiples facteurs en jeu, nous n’allons pas répondre à l’ensemble des questions scientifiques liées à la problématique du goût. Plusieurs volets complémentaires doivent être envisagés sur le même principe, en se donnant les moyens d’analyse de plusieurs variables telles que le type de cancer, le type de traitement, etc. Nous poursuivons donc la recherche de financements et de partenaires pour affiner notre compréhension des différences inter-individuelles en matière de perception et de préférences alimentaires.
CANUT explore le rôle de l’alimentation dans la qualité de vie des patients au travers d’une approche expérimentale du plaisir de déguster des aliments tests en conditions de Living Lab. Cependant, pour un même individu, il existe un très grand nombre de stimuli alimentaires et de situations de repas. Prendre en compte ces variabilités est nécessaire pour envisager l’adaptation des recommandations au plus grand nombres. Nous envisageons pour cela de nous appuyer sur les Sciences Humaines et Sociales afin d’étudier les relations à l’alimentation des patients et de leurs proches tout au long du traitement, et au-delà.
Enfin, une meilleure connaissance des mécanismes est nécessaire, au niveau moléculaire, cellulaire, central et il est prévu de soumettre de nouveaux projets nationaux et internationaux.
De quelle manière le Cancéropôle CLARA vous soutient-il dans vos projets ? Quel support le Cancéropôle CLARA et son réseau peut-il vous apporter en plus ?
Le Cancéropôle CLARA nous a fortement soutenu aux différentes phases du montage du projet CANUT, et je l’en remercie vivement. Aujourd’hui le Cancéropôle CLARA est un partenaire clé dans le pilotage administratif de CANUT et il nous accompagne dans la gestion du projet. Demain, le CLARA pourra poursuivre son assistance au montage des futurs projets, dans l’identification des Appels à Projets pertinents, dans la mise en relation avec d’autres équipes, dans la diffusion des résultats, la mise en réseau avec des acteurs académique, médicaux et socio-économiques.