Ana Henino est chargée de recherche Inserm au Centre de Recherche en Cancérologie de Lyon (CRCL), Département Plasticité des cellules cancéreuses/ équipe Signalisation, métabolisme et progression tumorale. Pendant sa thèse de doctorat, elle a étudié les mécanismes moléculaires impliqués dans la mort des lymphocytes B et identifié le c-FLIP comme un régulateur clé de l’apoptose dans les centres germinatifs. Elle a été recrutée comme chargée de recherche à l’Inserm en 2007 et co-dirigé le groupe « Immunologie de l’allergie cutanée et vaccination » à l’Inserm U851 à Lyon. Depuis 2011, ses recherches sont basées au CRCL Inserm 1052 à Lyon et se concentrent sur la régulation de la réponse immunitaire des cellules T CD8+ dans le pancréas dans le contexte de la pathologie (diabète et cancer du pancréas).
Vous étiez lauréate du programme OncoStarter du CLARA avec le projet ImmunoADK démarré en 2015. Pouvez-vous décrire en deux mots ce projet ? Que peut-on en retenir ?
Le projet ImmunoADK soutenu par le CLARA nous a aidé à mettre en évidence un marqueur d’apparition, de progression et d’agressivité de l’adénocarcinome pancréatique : la protéine ßig-h3. L’adénocarcinome pancréatique est la forme la plus courante de cancer du pancréas dont on recense, en France, plus de 11 000 nouveaux cas chaque année. Ayant observé une quantité anormalement forte de la protéine βig-h3 dans des tumeurs pancréatiques, nous avons émis l’hypothèse que cette protéine, présente dans le stroma, pourrait jouer un rôle important dans ce blocage de la réponse immunitaire décrit dans les adénocarcinomes pancréatiques. Nos travaux ont montré que la neutralisation de cette protéine augmente la réponse immunitaire anti-tumorale en inhibant ainsi croissance tumorale et ont fait l’objet d’un dépôt de brevet. Par ailleurs, l’équipe a mis au point les dosages de la protéine βig-h3 sur des échantillons de tumeurs ou à partir du sang. Nous essayons aujourd’hui de déterminer la relation entre le dosage de la protéine ßig-h3 et le stade de développement de la maladie, ce qui pourrait permettre un diagnostic précoce de l’adénocarcinome pancréatique et de ses rechutes. De plus, la protéine ßig-h3 s’est révélée être une cible thérapeutique d’intérêt pour l’industrie pharmaceutique. A terme, des traitements ciblant cette protéine pourraient voir le jour.
En 2017 et 2018, grâce à l’action concertée du CLARA et d’Inserm Transfert, vos travaux ont pu être porté à l’attention de deux géants de l’industrie pharmaceutique : GSK et SANOFI. Comment se sont passées ses rencontres ? Comment percevez-vous l’intérêt d’une big pharma pour vos travaux de recherche académique ? Comment cela se traduit concrètement ?
Le CLARA et INSERM Transfert ont été très importants pour la rencontre avec ces deux pharma. Grâce à l’accompagnement du CLARA sur le volet valorisation, notre projet a retenu l’attention de GSK et nous sommes actuellement en cours de discussion pour développer un partenariat. D’autre part le dépôt de brevet concernant l’utilisation de ßig-h3 comme cible thérapeutique, accompagné par INSERM TRANSFERT, a été à l’origine du financement par Sanofi du prix de l’innovation « Sanofi iAward 2018 » dont je suis lauréate. Ces opportunités représentent clairement un soutien précieux pour le développement de la thématique de recherche de mon groupe.
Demain, qu’attendez-vous du CLARA ? Comment pourrions-nous (mieux) accompagner vos projets ?
Le ciblage de cette protéine (ßig-h3) pourrait constituer un nouveau traitement du cancer du pancréas. Nous souhaitons aboutir à l’évaluation du potentiel thérapeutique de notre cible en phase clinique. L’accompagnement du CLARA notamment dans les discussions avec GSK représente pour moi un atout majeur pour l’aboutissement de ce projet de collaboration.